Le conte est né au XVIéme siècle
dans les habitations coloniales. La nuit tombée le
maître béké permettait aux esclaves de
se réunir pour écouter celui qui allait leur
raconter des histoires : le conteur.
Le conte avait pour fonction de distraire et d'amuser. Il
était aussi une parole de résistance où
l'on pouvait entendre des paroles et messages interdits. C'est
pour cela que l'on trouve souvent dans les récits beaucoup
d'onomatopées, des dialogues incessants entre le conteur
et l'assistance et de longues digressions humoristiques.
Le conteur intervient encore aujourd'hui dans les veillées
mortuaires pour capter l'attention des personnes venues soutenir
la famille du défunt, c'est une manière de symboliser
la continuation de la vie.
Il délivre des comptines, des histoires drôles,
des devinettes, par exemple :
Yééé-Krik ? hurle le conteur ;
Yééé- Krak ! doit répondre
l'assemblé.
Kouté pou tann tann pou konpwan
mé pa mélé non mwen adan bagay la
sa
Ecoutez pour entendre, entendez pour comprendre
mais ne me mélez pas à ces choses là...
(puis le conteur raconte une fable et puis d'un coup, il lance
une devinette :)
Sa ki ka fè y pa ka sevi'y, sa ki sèvi'y
pa té ké pé kloué'y ?
Qui l'a fait ne s'en sert pas, et celui qui s'en sert ne peut
l'avoir construit ?
Un cercueil doit répondre l'assemblée.
(Etc).
Le conte met en scène des humains ou des animaux. Les
héros de narration récurents sont :
Ti-jean ("petit jean", représente
la fragilité, la faiblesse et la ruse) ;
Misyé Li Wa ("Monsieur le roi", symbolisant
le maître de la plantation) ;
Manman Dlo ("maman l'eau", la sirène)
;
Compère lapin (le lapin représente la
malice, le cynisme, et la débrouillardise) ;
Compère Zamba (éléphant symbolisant
l'esclave travaillant dans les champs de canne).
"Leur
offrir un convenir de langage et d'onscurité, par où
perdure en toute l'imprévu de la parole : comme d'une
épaille grandissant ses lunes, sur des ombres sculptées".
Edouard GLISSANT
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